C'est, semble-t-il, à Louvain qu'Érasme structura sa conviction qu'une étude critique, et donc adéquate, de la Bible nécessitait l'étude du grec et de l'hébreu. Aussi appuya-t-il les démarches des exécuteurs testamentaires de son ami Jérôme Busleyden (†1517) qui aboutirent, au début 1518, à la création du Collège des Trois Langues. L'institut accueillit dix boursiers et trois professeurs : un latiniste, un helléniste et un hébraïste de premier plan. L'ouverture eut lieu en septembre. Les installations comportaient une salle à manger, une salle de séjour, une chapelle, une bibliothèque, une salle de cours, des chambres pour le président et les professeurs et un dortoir pour les étudiants . L'idéal professé au Collège était que, au lieu d'accepter aveuglément des déclarations magistrales passant de génération en génération par des 'disputes' ingénieuses, il s'agissait de mener une recherche personnelle, basée non sur une autorité mais sur l'objet même. Cette méthode provoqua la réaction négative de plusieurs théologiens louvanistes qui l'assimilaient aux idées de Luther. Non sans difficulté, le Collège fut intégré à l'Université en 1519, tout en restant autonome vis-à-vis de la Faculté des arts. Les quarante premières années du Collège des Trois Langues marquèrent la période d'apogée de l'humanisme à Louvain. Des linguistes de grande qualité y furent formés; plusieurs élaborèrent des grammaires latines, grecques et hébraïques. La méthode critique du Collège inspira aussi des étudiants des Facultés de droit et de médecine tel Vésale, de futurs historiens, des initiateurs de disciplines nouvelles comme l'épigraphie et l'orientalisme et des passionnés de sciences, dont Mercator et Gemma Frisius. Juste Lipse (1547-1606) fut le dernier tenant de la période humaniste au Collège des Trois Langues. L'humanisme avait évolué et le mouvement culturel créateur s'était fondu en une discipline scientifique érudite : les "études classiques".