Entre pragmatisme et curiosité
Sa formation
Après avoir commencé un cursus d’ingénieur civil en 1911 à l’Université catholique de Louvain, Georges Lemaître change de voie après la Grande Guerre. Il s’inscrit dans les filières mathématique et physique. Il y fait la connaissance d’un professeur qui sera décisif dans sa formation : Maurice Alliaume. Ils partagent de multiples intérêts communs tels que la mécanique classique, la relativité et le calcul numérique. Le fait de côtoyer Alliaume dans sa jeunesse va fortement pousser Lemaître à s’intéresser au calcul numérique tout au long de sa carrière.
Le Differential Analyser de Bush
D’août 1932 à février 1933, alors qu’il commence à être reconnu pour ses recherches en cosmologie, Lemaître effectue un voyage aux États-Unis où il participe à des conférences et rencontre d’autres chercheurs. Il séjourne alors quelque temps au M.I.T. et travaille avec un jeune professeur associé : Manuel Vallarta (qui avait fait partie de son jury de thèse au MIT en 1925-1926). Les deux scientifiques vont utiliser le Differential Analyser, un calculateur analogique, pour s’aider dans leurs recherches. Cette machine, dont la construction fut terminée en 1931, permet d’intégrer des systèmes d’équations différentielles ordinaires et d’en représenter graphiquement les solutions. Les deux physiciens vont mettre à profit les capacités du Differential Analyser pour étudier le comportement des particules chargées en contact avec la magnétosphère terrestre.
L’utilisation du Differential Analyser au début de sa carrière montre au scientifique belge toutes les potentialités des machines à calculer. Cette expérience ne fait qu’accroître son intérêt pour le calcul et les machines. Le potentiel de celles-ci est immense et il ne peut se passer d’elles pour ses travaux. C’est donc par envie et curiosité, mais également par nécessité que Georges Lemaître utilise les machines à calculer. Ses domaines de recherches requièrent des calculs très élaborés qu’elles seules peuvent résoudre.
« Le potentiel des machines à calculer est immense et Lemaître ne peut se passer d’elles pour ses travaux. C’est donc par envie et curiosité, mais également par nécessité que Georges Lemaître utilise les machines à calculer »
L'expérience de l'Occupation
Durant la Seconde Guerre mondiale, la Belgique est occupée par les Allemands. Lemaître et sa famille, comme bon nombre de Belges partent en exode. Le périple de la famille Lemaître est cependant mis à mal par l’avancée rapide des troupes allemandes en territoire français et Georges Lemaître doit rentrer à Louvain. Les quatre années d’Occupation le privent de ses échanges avec la communauté scientifique internationale. Isolé, il perd le fil des avancées scientifiques récentes. En physique notamment, un fossé s’est creusé entre Lemaître et les scientifiques qui ont pu continuer à bénéficier des échanges internationaux.
Cependant, la guerre permet à Georges Lemaître de se plonger dans d’autres lectures qui ne sont pas liées à la cosmologie. Il retrouve alors les écrits de Poincaré (Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste, 1892), de Cartan (Leçons sur les invariants intégraux, 1922), et de Lagrange (Mécanique analytique, 1788). Ces lectures réveillent son intérêt pour les orbites des particules chargées et l’orientent vers des domaines davantage liés au calcul.
Ses nouvelles recherches
Après la guerre et au cours des deux décennies suivantes, ses recherches cosmologiques qui l’ont rendu célèbre ne constitueront plus le point central de son travail, même s’il continue de publier et de donner des conférences à leur sujet.
Lemaître va alors se pencher davantage sur d’autres questions liées intimement à son hypothèse de l’atome primitif. Ses nouvelles recherches, qui se situent dans le prolongement des anciennes, vont alors s’orienter plus vers la mécanique ainsi que vers le calcul numérique. Elles nécessitent l’utilisation de machines à calculer de plus en plus performantes.
« Ses nouvelles recherches vont se tourner davantage vers le calcul numérique. Elles nécessitent l’utilisation de machines à calculer de plus en plus performantes »